Acier & économie circulaire : les enjeux d’une production d’acier automobile décarbonée

Contexte

La nécessaire électrification du parc automobile requiert une baisse de l’empreinte carbone des véhicules électriques, dont le second poste d’émission de gaz à effet de serre (GES), après la batterie, est l’acier, qui compose en moyenne de 70% du véhicule. L’industrie automobile consomme ainsi 25% de l’acier produit mondialement, tandis que la production globale d’acier est responsable de 8% des émissions de GES. 

Alors que l’acier est aujourd’hui produit majoritairement via la voie traditionnelle par des hauts-fourneaux, consommateurs en charbon et très émetteurs de CO2, de nouvelles technologies telles que la réduction directe du minerai de fer à l’hydrogène (H2-DRI, Direct reduced iron) dans les fours à arc électrique (EAF, Electric Arc Furnaces) font leur apparition, et sont très largement intégrés dans les stratégies de décarbonation des aciéristes.

Les EAF permettent une utilisation accrue de ferraille d’acier, qui pourrait venir compléter le H2-DRI pour contribuer à réduire l’empreinte carbone de la production d’acier, tout en limitant l’extraction de matières premières primaires.

Cet intérêt pour une utilisation accrue d’acier recyclé se retrouve notamment chez certains constructeurs automobiles, afin de diminuer les émissions de leur supply chain et de réduire leur dépendance à certaines chaînes d’approvisionnement. 

Ces initiatives sont encouragées par le cadre réglementaire européen, notamment par la révision de la directive sur les véhicules hors d’usage qui vise à renforcer les exigences de circularité de la conception à la gestion des VHU. La proposition actuelle de la Commission mentionne la fixation d’objectifs de contenu recyclé obligatoire pour l’acier, dont la proportion reste à définir.

L’enjeu de l’incorporation accrue de ferraille dans la production d’acier réside aujourd’hui dans la qualité, qui doit être suffisante pour répondre aux standards techniques. En effet, aujourd’hui, la ferraille issue des VHU est trop polluée par des matériaux tels que le cuivre ou l’aluminium pour produire de l’acier plat utilisé dans la fabrication automobile.

Description

Le projet vise à évaluer le potentiel du secteur des VHU pour fournir de la ferraille de haute qualité compatible avec les EAF (avec ou sans DRI) afin de favoriser la décarbonation de la production d’acier destinée à l’industrie automobile. 

L’objectif est de nourrir les réflexions de la Commission autour de l’instauration d’un seuil minimum d’acier recyclé dans les véhicules neufs.

En collaboration avec Indra, acteur majeur du recyclage en France, l’IMT a procédé au démantèlement en profondeur de 300 VHU représentatifs du parc français actuel afin d’identifier les conditions techniques (démontage supplémentaire, post-broyage avancé, meilleures pratiques d’éco-conception…) pour obtenir des ferrailles de haute qualité. Des protocoles ont été ajoutés aux processus habituels de démontage pour extraire le maximum de polluants de l’acier, en particulier le cuivre et l’aluminium. Les coûts supplémentaires engendrés par ce processus ainsi que la valeur ajoutée issue des matériaux extraits ont également été évalués. 

Ces VHU démantelés en profondeurs (‘“deep-dismantling”) ont été broyés et sont actuellement en cours d’analyse dans un laboratoire indépendant (IRT Metz) pour

évaluer la qualité de la ferraille et son aptitude à être utilisée par l’industrie automobile pour la production de nouveaux véhicules. Un échantillon a également été envoyé chez un aciériste, afin de procéder à un essai dans les conditions réelles de production de bobines d’acier.

Ce Projet permet d’évaluer (1) si le coût supplémentaire de la main-d’œuvre nécessaire pour le “deep-dismantling” est compensé par des revenus plus élevés provenant des matériaux secondaires générés, (2) la qualité et les quantités de cuivre et d’aluminium qui peuvent être récupérées (3) la qualité de la ferraille obtenue et sa compatibilité avec les EAF. 

L’essai pourrait ainsi justifier la généralisation de ces nouvelles pratiques, ainsi que la nécessité d’améliorer l’éco-conception.

L’IMT échange avec différents acteurs de la chaîne de valeur sur ces sujets, notamment avec des acteurs industriels, afin de recueillir les différentes perspectives et comprendre les nombreux enjeux stratégiques. Nous conservons également une vision globale du sujet de décarbonation de la production de l’acier grâce à notre proximité avec l’IDDRI et les sujets de deep-decarbonization pathways (DDP).

Équipe

Untitled design
Hannah Gross
Chargée de projet Matériaux critiques et recyclage dans l'industrie automobile
photo_5314705258238296222_y (2)
Jean-Philippe Hermine
Directeur général