Agrocarburants : quel rôle dans la transition du transport routier ?
Contexte
Les agrocarburants ont historiquement constitué l’un des premiers leviers de décarbonation du secteur routier. A l’instar du Brésil – puissant producteur d’éthanol fabriqué essentiellement à partir de canne à sucre -, certains pays dotés de ressources importantes en biomasse ont bâti une large partie de leur mobilité sur les agrocarburants. De l’avènement récent des motorisations dites « zéro émission » [à l’échappement] permis par les vecteurs électrique et hydrogène, combiné au caractère limité de la disponibilité en biomasse, résulte de profondes interrogations relatives aux affectations à prioriser pour les agrocarburants. Jugés plus complexes à décarboner, les poids-lourds ainsi que les secteurs maritimes et aériens semblent constituer des cibles privilégiées dans la stratégie européenne actuelle.
Au-delà de cette tendance générale, ces carburants dits « alternatifs » – terme qui englobe les agro ou biocarburants et les carburants synthétiques – font l’objet d’un regain d’intérêt pour plusieurs raisons. Tout d’abord, certains Etats peinent à atteindre leurs bouclages énergétiques relatifs aux scénarios bas-carbone. Dans ce contexte, les agrocarburants représentent une énergie facilement opérationnelle qui nécessite peu d’investissements à court terme, contrairement aux technologies électrifiées notamment. De plus, les logiques fiscales historiquement encourageantes et le soutien économique à la filière sur l’ensemble de sa chaine de valeur permettent d’afficher un coût relativement faible pour l’usager.
En amont, les volumes de production sont fortement vulnérables au changement climatique et à la sortie programmée de certains intrants phytosanitaires, comme l’illustrent les récents débats concernant les néonicotinoïdes. Par conséquent, la réduction des rendements à prévoir pourrait plus largement questionner la concurrence des usages de la biomasse et ainsi mettre à mal les schémas agricoles en vigueur.
La multiplicité des paramètres, significatifs mais non exhaustifs, mentionnés ci-dessus justifie un travail approfondi autour de la place des agrocarburants dans la mobilité de demain.
Description
À partir d’une compréhension fine des travaux établis et en connaissance des enjeux relatifs à la production de la biomasse, l’Institut Mobilités en Transition vise à proposer une expertise accrue sur les affectations possibles des biocarburants dans les transports français. Afin de faire atterrir ce sujet souvent mal circonscrit, de nombreux sous-jacents sont à considérer :
- Narratif d’indépendance énergétique
- Intérêt des co-produits protéiques (tourteaux) pour l’élevage
- Nécessité pour la décarbonation de certains secteurs (militaire)
- Création de rentes par des marchés relativement captifs appelant des oligopoles
- Coût budgétaire pour l’État français
- Demande en eau, en engrais azotés, et impacts indubitables sur la biodiversité
- Enjeux liés à la pollution de l’air de ces carburants en milieu urbain alors même que certains agrocarburants sont encouragés en ZFE
- Profitabilité des metteurs sur le marché compte tenu des options de développement qui s’offrent à eux dans les différentes filières de biocarburants (logique d’affectation)
- Dynamiques marchés sur les importations et exportations, et ce pour les matières premières, les huiles et/ou les produits finis