03 Mai 2024

Fin du véhicule thermique : pourquoi et comment y parvenir ?

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Jean-Philippe Hermine
Directeur Général

Dans le cadre de la campagne pour les élections européennes 2024, le think tank Terra Nova a demandé à différents experts de formuler des recommandations sur plusieurs questions stratégiques pour l’avenir de l’Union européenne. Dans ce contexte, alors que certains émettent des doutes sur les orientations du Green Deal concernant la décarbonation des mobilités en général et l’avenir du véhicule électrique en particulier, Jean-Philippe Hermine (directeur de l’IMT) a répondu aux controverses en cours et trace le chemin d’une politique industrielle qui permette à l’Europe de tenir son rang dans la compétition avec la Chine et les Etats-Unis.

 

Introduction

 

Pour décarboner le secteur des transports au niveau requis par les engagements européens et les exigences climatiques, l’électrification du parc de véhicules n’est pas l’unique réponse. D’autres moyens vont d’évidence y contribuer qui peuvent s’avérer moins complexes à mettre en œuvre, socialement moins douloureux et tout aussi utiles sur le plan environnemental. Quel que soit le scénario retenu, ceux-là devront être actionnés : développer plus encore les transports en commun en quantité et qualité (ferroviaire, cars express haute fréquence, lignes de co-voiturage) ; sécuriser les autres modes (vélos, véhicules intermédiaires), assurer leur interopérabilité avec les autres solutions de transport et, bien sûr, maîtriser la demande de mobilité (télétravail, signal prix sur les carburants…). Pour autant, selon la quasi-totalité des scénarios disponibles et crédibles, l’ensemble de ces autres leviers ne pourraient contribuer à réduire au maximum que de 20% les émissions de gaz à effet de serre (GES) des secteurs de la mobilité et du transport de marchandises d’ici 2050 en Europe.

D’autres options technologiques/énergétiques que la pure électrification des véhicules pourront également contribuer à la trajectoire de décarbonation des mobilités. Il s’agit des carburants alternatifs : biogaz, agro-carburants ou encore hydrogène décarboné. Cependant, à ce stade, ils sont clairement moins performants à la fois sur le plan énergétique et sur le plan environnemental. Ils ne le sont généralement pas non plus du point de vue économique sans un soutien important et continu des Etats pour développer ou maintenir leur usage. Par ailleurs, les volumes disponibles pour ces carburants alternatifs risquent fort d’être contraints et ils devront être fléchés de préférence vers des usages difficiles à électrifier, tels que le transport maritime ou aérien, ou vers la niche du transport longue distance de marchandises s’agissant du routier.

En conséquence, de quelque façon que l’on retourne la question, la poursuite de la neutralité carbone pour la mobilité des personnes et le transport de marchandises passe immanquablement par une électrification radicale du parc de véhicules particuliers, utilitaires ou poids lourds d’ici 2050.

Le présent papier poursuit deux finalités. Tout d’abord, répondre aux principales controverses qui entament aujourd’hui la crédibilité de cette perspective et qui ne manqueront pas de prendre place dans la campagne des élections européennes de juin 2024, que ce soit sous la pression de partis populistes écolo-sceptiques ou sous la pression de divers lobbies réfractaires à la transformation de leur modèle d’affaire (I). Ensuite, tracer les orientations qui permettront, lors de la prochaine mandature, de compléter le cadre règlementaire fixé par le Green Deal (notamment la fin de la vente de véhicules émetteurs à partir de 2035) pour s’attaquer aux enjeux sociaux, environnementaux, industriels et stratégiques aujourd’hui insuffisamment traités (II). Au final, le but est d’objectiver les enjeux et d’affirmer une volonté politique en donnant plus de corps et de cohérence à ce projet de transition crucial au niveau européen.

 

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