20 Sep 2024

PLF 2025 : 1,5 milliards d’euros de recettes additionnelles liées à la fiscalité routière justifient de conserver l’enveloppe dédiée au verdissement en 2025

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Louis-Pierre Geffray
Coordinateur des programmes
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Dans un contexte budgétaire et politique incertain, l’Institut Mobilités en Transition souhaite rappeler que les recettes fiscales générées par l’ensemble des mécanismes fiscaux liés à la route pourraient générer 1,5 milliards d’euros de recettes additionnelles en 2025 comparativement à 2024. Si la logique budgétaire d’affectation des moyens ne prévaut pas en France au sein des budgets de l’État, nous estimons que cet élément justifie de lui-même que le montant de l’enveloppe dédiée au verdissement des véhicules soit a minima conservée l’année prochaine. Ce billet de blog vise tout d’abord à rappeler les évolutions de fiscalité déjà discutées en 2023 pour l’année 2025. Nous montrons ici l’utilité et la nécessité du maintien de l’ambition des mécanismes du malus CO2 et du malus poids, du fait des marges de manœuvre qu’elle procure du côté des dépenses fiscales. Cette ambition permet de ne pas réduire le soutien au verdissement des ventes de véhicule, à l’aube d’une année charnière pour le cadre réglementaire européen (nouveau palier à franchir dans la trajectoire CAFE 1 Corporate Average Fuel Economy ). Enfin, ce billet de blog propose une évolution du conditionnement des aides au verdissement au sein de l’enveloppe de dépenses à 1,5 milliards d’euros en 2025, de sorte de la rendre plus performante d’un point de vue social et environnemental, tout en intégrant les évolutions attendues du mix énergétique des ventes.

 

1,5 milliards d’euros de recettes additionnelles générées en 2025 par la fiscalité liée à la vente de véhicules neufs

 

L’IMT a entrepris depuis plus de 2 ans des travaux visant à suivre la structure de la fiscalité routière française. Les analyses internes menées démontrent que l’évolution cumulée des 23 mécanismes fiscaux qui impactent et façonnent le parc ou les pratiques de mobilités peuvent générer plus d’1,5 milliards d’euros de recettes supplémentaires en 2025 tout en procurant plus d’équité et plus de vertu environnementale. Les évolutions proposées (ou reprises des choix déjà actés pour 2025 dans le PLF 2024) se décomposent telles que :

580 millions d’euros de recettes additionnelles générées par le malus CO2 [proposition IMT] : par un décalage du seuil de déclenchement de 5g passant de 118g à 113g et un renforcement de 30% du barème resté inchangé depuis 5 ans. Une augmentation justifiée au titre de l’augmentation des prix de transaction observés sur l’ensemble des véhicules particuliers vendus sur les 3 dernières années, de sorte que les montants unitaires du malus ne diminuent pas en proportion du prix d’achat des véhicules.

690 millions d’euros de recettes additionnelles générées par le malus poids : par l’intégration des véhicules hybrides rechargeables dès 1800kg (mesure décidée en 2023) et un déclenchement du barème à 1550kg pour toutes les autres motorisations – hors électrique – [proposition IMT]. L’IMT insiste sur la nécessité d’une visibilité pluriannuelle à 6 ans concernant le malus poids, avec une baisse du seuil de déclenchement de 50kg par an jusqu’à 2030 pour créer un signal susceptible d’orienter l’offre des constructeurs qui se construit sur plusieurs années.

410 millions d’euros de recettes additionnelles générées par la révision du barème kilométrique (transverse à plusieurs mécanismes fiscaux tels que les frais réels, le remboursement des indemnités kilométriques…) [proposition IMT] : par la suppression de la prise en compte de la puissance fiscale du véhicule pour déterminer les frais kilométriques. Cette variable revient aujourd’hui à subventionner l’usage de véhicules lourds, puissants. L’IMT propose de ne conserver qu’un barème fonction de l’énergie du véhicule pour encourager les kilométrages réalisés en véhicule électrique.

250 millions d’euros de recettes additionnelles générées par une révision des fiscalités propre au B100 et GNV [proposition IMT] : l’IMT considère que la logique d’encouragement du B100 par une fiscalité dédiée ne contribue pas à une décarbonation accrue dans un contexte où l’incorporation de biocarburants 1G est limitée à 7% en énergie en Europe et a fortiori en France. L’IMT recommande également d’aligner la fiscalité du GNV fossile sur celle du diesel B7 car il ne présente pas de valeur ajoutée pour la décarbonation. Cette mesure encouragerait par la même occasion le passage au bioGNV, notamment pour les usages ne disposant pas de solutions électrifiées pour se passer de carburants fossiles.

120 millions d’euros de recettes additionnelles générées sur les taxes perçues sur l’électricité (incluant CTA, TLFCE, TICFE, TVA) : il s’agit simplement des recettes additionnelles issues de l’accroissement du parc de véhicules électrifiés en circulation.

40 millions d’euros de recettes additionnelles générées par les taxes sur l’affectation des véhicules à des fins économiques (ex-TVS 2 Taxe sur les véhicules de sociétés ) [mesure votée en 2023] : Ces recettes additionnelles sont liées à la fin de l’exonération des hybrides simples et hybrides rechargeables en 2025. Le TCO des véhicules hybrides simples restera plus avantageux en 2025 malgré cette suppression.

570 millions d’euros de baisse des recettes de TVA et ex-TICPE : la décarbonation des transports devrait contribuer naturellement à une baisse de la consommation de carburant se traduisant par une baisse des recettes TICPE et TVA sur les carburants d’un demi-milliard d’euros.

Au final, l’ensemble de ces éléments présentent le potentiel de générer des recettes additionnelles de 1,5 milliards d’euros en 2025 par rapport à 2024, justifiant de conserver a minima l’enveloppe dédiée au verdissement des véhicules pour un montant équivalent à celui de 2024, soit 1,5 milliards d’euros.

 

Propositions d’ajustement pour conserver une dépense de verdissement identique à 2024

 

L’IMT considère que le leasing social initié en 2024 a démontré son utilité. Il renforce le besoin de produire des véhicules électriques de segment B compétitifs. Grâce à une offre nouvelle qui commence à apparaitre en ce sens, il sera tout à fait possible d’atteindre un accroissement significatif des volumes impliqués en 2025 pour un soutient de l’État de 600 millions d’euros. L’IMT considère donc qu’une aide de 6k€ à 7 k€ par véhicule est nécessaire et pourrait être suffisante pour atteindre des mensualités de 100€/mois sur des véhicules de segment B. La nécessité pour les constructeurs de répondre aux objectifs CAFE 2025 présente une opportunité intéressante pour disposer de véhicules électriques à un prix négocié compatible avec un objectif de déploiement du leasing social.

Par ailleurs, comme l’a rappelé le SGPE, la trajectoire de décarbonation du transport routier passe également par une modération dans la taille des véhicules. Ainsi, l’IMT propose de conditionner le bonus à une masse à vide en ordre de marche inférieure à 1950kg. Cet ajustement, combiné au maintien de l’éco-score et de la limite de prix de 47k€ permettrait de conserver une enveloppe de 530 millions d’euros pour le bonus écologique maintenu à un montant de 7k€ pour les déciles D1 à D5 et de 4k€ pour les déciles D6 à D10.

En 2025, l’aide unitaire établie pour les VUL pourraient être maintenues à 3k€, le montant d’aide pour les deux roues serait également conservé à sa valeur actuelle, soit 900€. Le bonus destiné aux quadricycles 0 émissions à l’échappement serait lui porté à 2000€ dans une logique de développement de l’offre. Il en résulterait des dépenses de 180 millions d’euros pour les VUL et 100 millions d’euros pour les deux roues et quadricycles. La prime à la conversion serait conservée mais réduite à 90 millions d’euros en montant, pour se concentrer uniquement sur les véhicules électriques.

Au final, l’ensemble de ces ajustements permettrait de conserver une enveloppe au verdissement de 1,5 milliards d’euros. Un scénario à 1 milliard d’euros nécessiterait de supprimer la prime à la conversion, de diviser par 3 les aides aux VUL, et de diviser par deux l’aide de 4k€ sur les véhicules particuliers aux déciles 9 et 10. Ces effets seraient délétères et risqueraient de provoquer un précédent alors que les constructeurs doivent maintenir un niveau élevé de ventes de véhicules 0 émission à l’échappement pour atteindre le nouveau palier de la norme CAFE en 2025. Rappelons toutefois que cet objectif est connu et anticipé par les constructeurs depuis plus de 5 ans.

Notons enfin que le dispositif de certificats d’économie d’énergie nécessaire au soutien à la vente des poids lourds 0 émission nécessitera d’être réabondé à hauteur de 190 millions d’euros en 2025 en cohérence avec la période de reporting des standards CO2 poids lourds à partir de mi-2025. Ces montants doivent permettre de pérenniser un passage à l’échelle des poids lourds électriques à batterie pour tendre vers une part de véhicules 0 émission dans les immatriculations supérieure à 5% début 2026. Puisque ce mécanisme est financé par certificats d’économie d’énergie, il n’incombe pas au budget de l’État et n’est donc considéré dans les quantifications ci-dessous.

Leviers non budgétaires à solliciter parallèlement pour accélérer le verdissement des flottes

L’IMT rappelle que pour tenir les objectifs de verdissement des immatriculations, il est parfaitement légitime de recourir à des mesures plus coercitives pour les flottes d’entreprises. En ce sens, l’IMT soutient les mesures visant à revoir l’ambition des quotas de verdissement tels que la proposition de loi Adam 3 Proposition de lois : « Accélérer et contrôler le verdissement des flottes d’entreprises » le préconisait. Le rôle des règles comptables d’amortissement des véhicules particuliers d’entreprise pourrait également être significatif. En 2024 des exonérations d’impôts sur les sociétés sont massivement octroyées par l’achat de véhicules thermiques. La révision des catégories d’amortissement et limites d’émissions correspondantes pourraient procurer des effets tout à fait comparables à ce que la Belgique 4Loi organisant le verdissement fiscal et social de la mobilité a pu observer dans ses ventes sans pour autant dans un premier temps, affecter négativement les budgets de l’État. Enfin, une révision du mécanisme des avantages en nature semble également présenter une importance majeure pour la question du verdissement des flottes d’entreprises qui présentent toujours en 2024 un retard important par rapport aux ventes aux particuliers.

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